Dans le temps suspendu de l’atelier avec Patrick Laupin, l’attention et la concentration requises sont paroxystiques. La mobilisation intime est totale, l’implication de soi par soi procède d’une injonction de sa voix intérieure, qui se tient aux aguets, à l’affût. Une expérience de tension orientée vers une mise en oeuvre de libération. Une révélation de soi, de ses entraves dans et par les mots que l’on va extraire. La voix de Patrick nous capte en ce qu’elle nous reconduit à notre entière responsabilité: nul autre que nous même ne peut répondre de cette voix intérieure à convoquer. Une sommation douce et indomptable à la fois à laquelle on ne se soustrait pas. Hic Rhodus, hic saltus. Ceci importe à présente et rien d’autre. Au coeur de son silencieux chaos, la mise en branle agit là où quelque chose se terre et comprime, résiste. Le petit combat intérieur commence. Cette dimension agonique que l’on essaye d’apprivoiser, l’ordalie secrète qui se gagne à son propre insu. Un filament d’une extrême fragilité, une volatilité inouïe, comme tombée du ciel, dont on se saisit inexplicablement (à ne surtout pas tenter d’expliquer…). Volonté et miracle de cet appel. Comment se combinent ici la détermination et le laisser-faire ? C’est un mystère. Qui conduit ? Qui est conduit ? On ne sait pas, on ne se voit plus, on suit un invisible guide interne. Une sorte de daïmon, notre démon socratique, éveillé par Patrick, ne nous lâche pas tant que l’on n’a pas accouché de ce qui s’écrit – qui nous écrit bien plus que nous ne l’écrivons- et qui donne à entendre dans la surprise, ce que l’on ignorait mais qui gisait bien quelque part en nous, et qui sans cet effort d’extraction ne serait jamais venu au jour…Paradoxe d’une méthode ne reposant que sur la pleine confiance, excluant tout autre repère fixe, tout point d’ancrage rassurant. Juste le haut fil d’humanité qui nous relie à la parole de courage de Patrick sans laquelle on n’oserait se risquer jusqu’à la zone d’instabilité émotionnelle, le mur de non-maîtrise à franchir.
On ne répond que de soi – non de cette part d’inconnu en soi. Si on laisse le trouble advenir, et nous envahir, on tire de cet état d’intensité, sinon de quoi « engendrer une étoile qui danse », du moins des jalons de désenclavement de soi.