Les jours rongés

L’érosion s’attache à nos pas

Nous nous égarons

Quand nous croyons

Grandir

Et le chant fluet

Qui nous porte s’atténue

A la mesure des jours rongés

Étymologie ironique

Éros est dans l’érosion

Tout disparaît :

Est-il besoin d’en faire un devoir

Pour brader ce qui reste ?

 

Sous le ciel qui n’existe pas

On a son opinion sur la valeur

Des choses

 

Le rire d’un dieu

Ne nous éveille pas

 

On continue son bonhomme

De chemin

Parmi les fleurs

Et les morales établies

 

Sous le ciel qui n’existe pas

Les rides creusent

Sur les peaux minces

Des visages

Les peaux dessinent

L’empreinte de leur mémoire.

 

Sous le ciel qui n’existe pas

On expédie les affaires courantes

 

Le soleil d’hiver radiographie

Les arbres nus

On lutte contre les circonstances

Extérieures

Ce qui s’appelle l’emploi du temps

 

On se raconte des histoires

Pour dormir

 

La pâte du ciel

-la purée des nuages-

Est une langue lactée

Pour la tristesse

Que soulignent

Les méandres

Du fleuve.

 

Peine incurable et salutaire

D’exister

Dans l’espace

Plus que dans le temps

Encore

 

En tranches, en paquets, en troupeaux

Nous sommes

en l’espace

 

Ni contenant

Ni contenu

La séparation elle-même

 

Ce qui encombre

C’est soi-même

 

Etre

Est un rêve naïf

 

Etre ensemble

Est une utopie

 

N’être pas

est douteux

 

Sans chemin on croit

S’égarer

Mais c’est le chemin parfois

Qui égare

Quand l’énergie s’épuise

A le poursuivre

 

Mémoire jolie

Et absence de réel ?

Non !

Le réel d’abord

Et le langage

Ensuite

Qui en consomme la perte

Et qui la commémore…

 

Yves Humann

Sous le ciel qui n’existe pas

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