« Père. Le roman du » de Jacques Morin, éd. Henry
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Le père c’est le point de départ de cinq ensembles de textes.
Ce père, l’auteur est passé à côté, la parole n’a pas pris, les phrases sont restées en l’air et le roman s’est perdu. Ce genre de situation, ça crée un manque avec lequel il faudra vivre vaille que vivre et sur lequel on peut poser des mots « du petit babillage au vieil essoufflement », autrement dit faire œuvre de poésie qui « demeure dans les sentiments et dans l’air épais du matin ». Et file ainsi la vie, cette quête de sens avec en surplomb le ressenti de la fin comme un « orgasme vide » qui grave les traces de ce mal de vivre que chantait Barbara, le désarroi quotidien que Jacques Morin nous livre en petites touches authentiques, vraies, honnêtes, au plus près de l’émotion juste. Il dit le corps encombrant, l’instabilité de la mémoire, l’attente interminable, le néant même incertain… Il y a dans ces pages la beauté d’un type qui dérive au plus creux de ses faiblesses assumées. Puis au bout du fil, comme une bouée, il retrouve un truc qu’il avait rangé dans un coin peut-être pour plus tard : « je me suis toujours refusé jusque là / au monologue amoureux // mon écriture voulait frapper, attraper, // agripper, saisir, mordre // plutôt que caresser // l’âge me rendrait-il plus faible / ou bien serait-il juste temps ».
…
« le mot amour est là / dans toute sa complexité… »
Et de conclure : « c’est l’aveu final / un peu candide et maladroit / au bout du livre / et du chemin ».
Je sais pas, cher Jacques, mais qu’est-ce que j’aime ce genre de maladresses.