La moisson des regards aux branches du miroir

Et si l’on gratte bien c’est comme à chaque fois
Viennent forcément les regards au temps des blés
Des regards périssables, une moisson de traces
Avec chacun sa vérité, son feu de paille.

Il en pousse partout comme des cris de bêtes
Je ne les comprends pas, ne sais que faire d’eux.
Bien sûr qu’on ne voit pas le piège qu’on se tend.
Comment le pourrait-on, la terre oublie les yeux.

Les mots sont là pour les nourrir, les réchauffer
Leur expliquer le tourbillon, la passerelle
Vertigineuse vers des plaines idéales
Les chambres du château où l’on file la rime.

Et puis les nuits d’effroi, les brûler par paquets
Les plonger dans l’écume de torrents en hiver
Avec de longs soupirs, chiendents mélancoliques
Des remarques idiotes, des chansons trop sucrées.

Mais les regards demeurent accrochés, pendus
À la fenêtre, mon paysage en est rempli.
Je sais alors qu’ils ne sont là que pour me dire :
Salut poète, obscur panneau signalétique

Poussé dans le fumier de tes contradictions
Peut-être un jour enfin sauras-tu parler clair !
Tu plongeras dans la douceur de respirer
Le clapotis du lac et le soir qui descend.

Alors tu te ressers un verre comme les grands
Tu longes les mur gris des couloirs incertains
Puis tu vas te coucher avec ta nonchalance
Sans un regard vers le miroir, l’ombre qui monte.