En écho au précédent billet de ma voisine de blog, j’ai convoqué moi aussi un double (appelons-le Arturo F.) qui a écrit ceci :
J’écris pour raconter ma vie / il y a des morceaux de vous dedans / j’écris pour ranimer des palimpsestes / et amuser les papillons / pour laisser une empreinte / dans notre commune gadoue / sur le sable mouvant de mes prétentions / j’écris parce que c’est plus facile / que de bâtir une cathédrale / j’écris parce que je ne sais pas parler / je cherche à jamais les mots / dans le labyrinthe de nos silences / le déclic de la mélodie de l’intérieur / celle qui pose un bouquet de consolations / certains jours devant les portes de nos maisons / j’écris pour repeindre les murs de mon cerveau / avec l’encre des souvenirs et de l’insolence mêlés / je guette la voix off qui va me relier à vous / je regarde par la fenêtre la mésange / picorer le morceau de gras que j’ai déposé pour elle / j’écris pour savoir parler avec la mésange / qui ne s’intéresse qu’au bout de gras / et pas du tout à ma poésie / elle n’est pas la seule mais j’écris à contre évidences / pour signifier au monde que je n’existe pas / j’écris pour ouvrir une autre porte / et passer par la fenêtre m’envoler avec la mésange / j’écris pour que quelque chose change / et pour penser à autre chose / et ne penser à rien d’autre / et ne pas trop penser quand même parce que ça fatigue / j’écris pour imaginer que j’écris / et prolonger le réel bien au-delà de l’horizon / j’écris pour trouver le calme et le tourbillon / enfiler le costume de neige / que me cousent des flocons de phrases / chaufferettes des soirs d’hiver / porter secours à ces instants qui se noient / sous mes yeux qui ne voient rien / allumer une lampe en me disant qu’ainsi / avec cette pauvre lumière hypothétique / je serai peut-être enfin moins seul / j’écris pour m’absenter un moment / pour me rendre visite et me donner de mes nouvelles / le temps de tenter faire transpirer une beauté de pacotille / dans des bras éphémères / laisser la prudence au vestiaire des fous / trouver compagnie chez les loups et les libellules /et les chats qui mangent les libellules / poser la raison sur l’étagère du trouble / ma passion aux pieds de la reine des nuages / tendre des cordes entre les arbres et les nuages / et danser dessus jusqu’à la chute certaine / j’écris enfin pour me nourrir avec les restes / du festin des origines / jusqu’à mourir d’inanition
Arturo F.