C’est devant la porte d’une cabane égarée
que se disent et se font les choses importantes

C’est ainsi que je suis mort sans le faire exprès,
un soir de lune sous les mélèzes.

La valise était trop lourde
et le cœur s’est fermé sur le seuil de cette cabane,
quand descendent les grandes ombres
comme des fleurs des champs
avant que vienne les troupeaux
et leurs cloches de lumière.

Les mirages mugissent à la porte des chambres.
Le train ralentit à la gare des amours.
Un air d’accordéon fleurit sur nos paupières.
Les hommes parlent fort dans l’écume des bars.

Je n’ai rien vu venir comme à mon habitude
car je sais cultiver cette naïveté
de confondre les nuages et les glaciers
les châteaux de sables et les ventres profonds.

Au gouvernail des grands voiliers
on se dirige comme on peut.
Il ne faudrait surtout pas louper le bon vent.

Les affaires sont dans le sac de toile épaisse
Dans ta poche tu tiens le viatique de ta mère.
Alors en route compagnon !
C’est l’heure où le soleil devient
rouge comme un coquelicot timide.

La ligne de cœur passe par l’inexprimable
entre la rose et le vent, le chant, le rossignol,
la larme et l’espérance, les voix et le silence.
Les cris qu’on retient ou qu’on lance en pure perte
s’amoncellent sur le seuil
d’une cabane abandonnée
et son petit jardin, cette fraternité
que dessinaient jadis le courage et les travaux des jours,
la sueur des jardiniers, les verres et les couverts
soigneusement rangés dans le panier d’osier,
les lendemains promesses de minutes douces
enveloppées dans du papier d’anciens journaux,
le sentiment d’entrer dans l’humaine lumière.