3 nouveaux compagnons de route arrivent avec ce numéro, Jean-Claude Martin, Jean-Louis Massot et Jean-Claude Touzeil, une génération…
« Un salut à toi, Émile. Tu ne t’appelais pas Émile, mais ton nom ne regarde personne. Tu es debout contre la portière d’une automobile. Tu es debout dans ma mémoire. Il n’y a pas longtemps que tu t’es relevé, la photo vient juste de glisser d’un tiroir. Je n’avais plus pensé à toi depuis longtemps. Même les morts finissent par s’oublier. Regagnez-vous une place près
du Bon Dieu quand quelqu’un songe à vous ? C’est un cliché, qu’aurais-tu fait de ces années ? Vois-tu ton destin “ensuite”, comme démange, paraît-il un membre amputé ?… C’est trop d’angoisse : je te remets dans ta cachette, Émile. On se rappelle un de ces soirs et on se fait une prière. » (Jean-Claude Martin)

« Les fanes qui jaunissent // Tu me parles / des mauvaises herbes / dans le jardin / des bonnes odeurs / de la pluie qui rend / la terre lourde. / Sur le cahier à spirales / tu as tracé / des lignes parallèles / à main levée / qui représentent / les rangs de la prochaine / récolte de patates / qui s’annonce riche / et que tu vas buter / avant que les fanes / ne jaunissent. / Je cherche toujours / des mots qui germeront pareil. / M’aideras-tu à les récolter / lorsque la pluie aura / cessé de tomber ? » (Jean-Louis Massot)

« Hygiène // Pour cho-cho / Pour choquer / Les cri-cri / Les critiques / Il cou-cou / Il couchait / Ses po-po / Ses poèmes / Sur pa-pa / Sur papier / À chi-chi / À chiottes » (Jean-Claude Touzeil)

Il y avait encore Max Laire et je ne résiste pas à recopier encore 3 aphorismes :
« Laisser des choses inachevées, afin d’être le seul à connaître la fin.
*
Environné par des roseaux, il longeait un étang. Il s’arrêta soudain, semblant recevoir un ordre secret, et se mit à penser.
*

D’une nature mélancolique, un soir de grand vent d’automne, il endossa un costume couleur de feuille morte. Il sortit et plus personne ne le revit. »

Et aussi, dans ce numéro je chroniquais les premiers ouvrages des éditions des Carnets du Dessert de Lune de Jean-Louis Massot dont le « Carnet d’aventure en chambre pour que le temps passé résiste à l’usure du temps » de l’artiste Gérard Sendrey qui vient de nous quitter et le « Carnet de petits rien » de Michel Bourçon.

La petite fabrique de rêve de Francis Krembel consacrait un numéro à Jean-Pierre Georges, je relevais ceci : « aussi un homme bêche-t-il un coin / de terre on le voit seul tout petit / il est l’agir humain complètement / dérisoire bouleversant. »