Été 1995, la revue n’est plus qu’en partie tapée à la machine à écrire. Gros Textes s’est acheté un ordinateur et une imprimante. La machine à marguerite de Dominique allait bientôt être rangée.
On accueillait Jean-Christophe Belleveau et je chroniquais le numéro 1 de sa revue « Comme ça et autrement » (ainsi que le numéro 2 de la revue de Michel Foissier et Samuel Autexier, « Propos de Campagne » alors que Décharge était déjà au numéro 82). « Je respire / l’odeur de la mer / je sais / faite de quoi / mais ne veux pas y penser ».
Dans ce numéro, on lisait également Claude Seyve dont je chroniquais une publication de ses éditions VR/SO qui allait compter à l’avenir, le premier opuscule d’Armand le Poête qui se terminait par ces mots : « Tout est poésie / même le silence / je répète / tout est poésie / même le silence ».
Une part belle était donnée aux aphorismes textes courts avec une première publication de Jean-Luc Lourmière « D’aucuns penseront que je suis timide ; d’autres, beaucoup plus psychologues, comprendront qu’ils me font chier. » « Il faut voir les hommes déféquer pour comprendre toute l’humilité de leur condition. »
Jean-Jacques Nuel arrivait aussi dans nos pages : « La ligne droite est le plus court chemin pour aller d’un point à un autre. Elle avait fini par croire que c’était ça la vie : un peu de désir entre deux rives, une atroce patience de la mort à venir et le souvenir inutile parce qu’on a peu vécu. »
Et puis surtout cet étonnant
bricoleur de mots que vient de rééditer « Le cactus inébranlable », Max Laire (https://actualitte.com/livres/61078/max-laire-le-bricoleur-de-mots) et dont les aphorismes me ravissaient :
« Il alluma un feu de tristesse.
*
Espérance.
Salle d’attente
*

N’ayant rien à perdre, il gagna.
*
Réussir une transfusion de rêve.
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Point de vue.
Parfois aveuglement.
*
Vous pensez comme les autres ?
Ne pensez plus !
*
Âgée, elle se débarrasse difficilement de fleurs fanées. »