Joue dans la poussière joue ! *
Être ce chant qui naît du ventre avec toutes les voix qui glissent comme des taches de couleur Une rumeur dans l’encrier La foule en marche sur le chemin à flanc de montagne Tu étales tes doutes toi aussi parmi la multitude Les fondations laissent à désirer Le but aussi Allons donc préparer un bon sandwich à l’illusion et la force de l’émotion pour détourner les peurs Les jours se peuplent de bêtes craintives Oh le gardien N’as-tu rien vu passer On meurt bien d’une boule de silence au fond des bois et toi tu rêves seulement de nuits claires D’être ce chant qui remplit le corps d’une créature naïve D’une de ton espèce précisément avec ses parfums de chèvrefeuille pour nous éclairer le passage délicat Alors on bâcle un peu la vie les amours les orages On bâcle les promesses et la délicatesse C’est promenade de sentiments aujourd’hui Et les amis perdus de vue surgissent dans le lierre entre les pierres comme des mirages aux contours incertains Je n’oublie pas non Je dénoue le désir et la fausse monnaie Je rassemble mes rossignols dans la grange et nous chantons ensemble les traces d’un sourire à l’ombre de la lune
* Fernando Pessoa