Je nous trouve bien impuissants pour attraper quelque chose de ce temps quand il se fait émerveillement, deux qui s’aiment sans contraintes par exemple devant un paysage flamboyant ou un lac au clair de lune… On prend juste un morceau du moment, un bout, un segment, on sait que c’est peu. Presque rien, mais on s’en contente, on lèche ce presque rien comme font certaines bêtes. On est bête.
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Quand je vois la perfection colorée des ailes de ce papillon, l’élégance improvisée de son vol, j’ai un peu
honte de mon corps unicolorement rosâtre, ces machins qui pendent de tous les côtés, cette démarche
maladroite, pesante, cette pesanteur…
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Toujours le même malheur : ne pas trouver de beau désespoir à sa taille pour faire le malin. Un coup on nage dedans, un autre on ne peut pas l’enfiler. Il vaut mieux compter sur la longue plainte pour aller mieux, retrouver force et joie.
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Remonter le torrent vers sa source.
Même un torrent de boue.
Retourner vers l’origine, l’enfance, le point de départ.
Plus l’arrivée s’approche,
et plus ce besoin de caresser la provenance s’impose.
On joue au saumon de plus en plus souvent en avançant.
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Ah la magie de l’instant,
oh combien ce ciel de brume épaisse en ce matin
s’accorde à la perfection à mes pensées.
Bon, en fait, c’était facile avec des pensées éternellement brumeuses.
Les forces magiques de l’instant
finalement ne se foulent guère.