L’obstination du liseron d’Olivier Hervy, Cactus Inébranlable éditions

C’est un type, il a plein de voisines et de voisins, c’est comme si pour lui la vie n’était qu’une question de voisinage dont il s’agit de consigner sous forme d’aphorismes les détails les plus truculents et certainement qu’il a raison le type, que la vie n’est que ça et qu’au fond chaque être, animal, objet est notre voisin et que l’aphorisme permet de dénicher à tous les coups le détail truculent qu’il porte en lui. Bon, dit ainsi, ça paraît facile…

Il y a la vieille voisine impeccable et le voisin bricoleur mais aussi la jolie femme, la vieille fille, le vieux mari qui avance péniblement et puis la boulangère, le paysan, le pompier, le plongeoir et le cyprès jusqu’à l’araignée d’eau pour qui l’étang est toujours gelé et la fontaine qui n’est qu’un puits extraverti… c’est un peu comme toute une caisse de playmobil qui font penser à ce poème de Prévert : « Ils sont marrants les êtres / Vous tout comme moi / Moi tout comme vous / Et c’est pas du théâtre c’est la vie c’est partout… » car on se marre bien à la lecture de ces aphorismes qui, en une subtile mise en abîme, distillent en même temps et à petites touches discrètes des leçons sur la pratique du genre : « L’aphorisme a pour vertu la concision. Une image, une remarque et nous voilà au but alors que l’auteur d’essais se lance maladroitement dans de longs développements, qui n’apportent rien d’intéressant. L’aphorisme, lui, est efficace, cinglant, même le haïku à côté est un immeuble de trois étages surplombant lourdement notre chaumière accueillante et discrète. »

Si le propre de l’aphorisme est de nous prendre par surprise, il faut bien admettre que les vies même de nos voisins sont des aphorismes sous la plume d’Olivier Hervy : « On pensait tous que le jeune N., si inventif et brillant, nous surprendrait à l’âge adulte. Et c’est le cas, puisqu’il a déçu tout le monde avec sa petite vie ordinaire. »

Évidemment, l’essentiel dans cette affaire est toujours dans l’ellipse :
« « 
Évidemment comme mon mari est mort brusquement, on m’a accusée d’être une empoisonneuse », me confie cette vieille voisine. Puis elle me propose un thé. Mais je dois rentrer. »
«
« Viens voir ! Je vais te montrer le marteau piqueur que je viens d’acheter ! », me dit tout joyeux mon voisin bricoleur. J’ai du mal à partager son enthousiasme. »