Pas par quatre chemins de Morgan Riet, éd. Donner à Voir, illustrations de Hervé Gouzerh.
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« Assis sur un banc / regarder les gens passer – / Bla-bla roux des arbres ». Les haïkus quand c’est réussi, ça me fait penser à des flocons de neige qui tombent au ralenti et qu’on regarde tomber longtemps assis sur un banc sous des arbres éternellement roux. Les bruits sont assourdis bien sûr par tout ce blanc, ce qui bouge peine à bouger, la terre est engourdie, c’est le royaume du presque silence (« Entre les cloches / et les oiseaux, un dialogue – / Mon silence y prend part »), c’est le ronron d’un chat, le tictac de l’horloge, un nuage immobile, la lumière est tamisé, la lune a son halo, la fête n’est que trace, le fracas du monde n’arrive pas jusqu’ici. « Un goéland frappe / le sol pour qu’un ver en sorte – / Ruse de poète ! ». Le poète s’efface ou se fond au bord d’un soir sans fin dans une étrange douceur de vivre.
On ne sait pas très bien au final qui est à la manœuvre mais c’est égal : « L’aboiement d’un chien / sur la portée du vent froid – / Qui tient la baguette ? »