Voici le premier et le dernier poème du dernier recueil de Patrice Angibaud « Faire (corps) avec ». Je viens d’apprendre qu’il est mort le 19 septembre 2020 :

Tu te payes de mots…
Tu te satisfais d’un salaire volubile
En lieu et place des actes
Que tu n’as pas posés
Et que tu sais désormais
Ne plus pouvoir poser…

Dès qu’il s’agit de vie
L’air te manque
Cruellement
Pour relever la tête
Essayer de faire face
Faire front

Tu te dégonfles comme un ballon
D’enfant qui n’a pas d’âge
Et tu joues à la marelle
De la fausse innocence des mots croisés

Tu fais semblant d’emplir le vide
Par de belles paroles
Auxquelles tu ne crois plus…

Tu parles et parles encore dans l’absence
De tout acte posé

Un acte
Un seul
Un nécessaire déchirement
Qui empêcherait la mort promise
De se glisser trop vite dans ton dos…

*

La paix des mains
Qui lentement plient le linge
Tout propre
Sur la table de la cuisine

Et levant les yeux vers la fenêtre
Cette sensation de connivence
Avec la paix des arbres du jardin
Dont les branches doucement
Plient et déplient la légère toile du ciel

La paix des mains et des branches
Dont le mouvement peu à peu
Élargit le regard aux dimensions de l’horizon