Si la vérité n’est pas buvable, buvons nos rêves

Je t’ai rêvée gouttes de pluie
qui tombées sur ma main s’en retournent au ciel
comme des voyageuses qui regrettent le départ.

Je t’ai rêvée dans le chant des essuie-glaces,
aux transhumances du bétail, brins de baisers
que l’on recueille sur nos miroirs pour les changer
en fleurs de trèfle, une chance au balcon
qui funambule au négatif de nos photos.

Nous sommes libres de courir nus sous la pluie.
Nous cherchons à comprendre le sens des saisons,
poser notre bateau sur l’onde d’une flaque
tout en nous racontant des histoires de ponts.

Au sommeil de nos poches se cache une carte.
Nous pensons nager avec la Dame de cœur.
On voit juste le sens que le doute s’installe.
Nous nageons dans l’inconnu et c’est tout blanc.
À nos lèvres rien n’a bougé, rien ne répond.

On pourrait repeindre l’avenir aux couleurs
des notes frêles d’un musicien maladroit
qui chutent telles gouttes de pluie messagères.

On voit s’évaporer l’illusion du poème,
l’écharpe de mensonge, tricot de chants opaques,
la vérité fondue au doute, tout devient clair.
Les fantômes du futur nous mangent dans la main,
nous invitent à venir à la table de fête
où l’on pourra dormir têtes posées sereines
contre la première pierre du paysage.