« À l’aube de la voix » de Léon Bralda, éd. Donner à Voir ( http://www.donner-a-voir.net/index.html )

 

Et nous voici encore à l’aube de la voix, dans les replis de l’enfance tout chargés déjà du pas lourd des rêves, de la mère derrière les volets et de l’amour, mêlé à la mort déjà, sur le chemin des écoliers.

L’enfance ça s’invente avec les mots des pauvres gens (comme disait…) « À tout à l’heure mon garçon », à tout à l’heure ou dans mille ans dans les replis du temps, on boit les mystères des chambres, on use le souvenir, on entend battre le pouls des mots et le monde se tait.

« On le sait, c’est certain ! Le ciel est lourd de n’être au fond qu’un jeu pour l’enfance profonde »

À l’aube de la voix, il y a également un animal mort, une charogne puisque c’est aussi avec la puanteur qu’on se construit, entre énigme et semblant, les jours de pluie quand les statues de ciment murmurent les secrets de la terre.

Et puis tout devient flou à l’aube de la voix. On est sur le seuil de la petite ferme isolée, on revoit le père avec sa pipe et son tricot de laine, les phares des voitures à travers la fenêtre, tout se mélange, la pierre et le fruit, l’amour et les ronces, le petit chat sur le couvre-lit rouge, et la télé qui raconte le monde tandis que quelqu’un attend que revienne le jour. Et il reviendra c’est sûr.